Au début des années 1970, une vague de paillettes, de couleurs vives et d’androgynie déferle sur le monde de la musique et de la mode. Le style glam rock, né au Royaume-Uni, explose en une réaction flamboyante à la sobriété du mouvement hippie finissant. Plus qu’un simple genre musical, c’est une esthétique totale. En effet, il est une célébration de l’artifice, de la théâtralité et d’une nouvelle forme de masculinité. Cet article vous plonge au cœur de cette révolution stylistique. Il évoque ses icônes britanniques, ses échos américains et français, et son héritage.
Le glam rock : Paillettes, provocation et révolution du style
Le Royaume-Uni des années 70 voit émerger une jeunesse en quête d’évasion et de nouvelles idoles. Le glam rock leur offre un spectacle total. La musique, un rock’n’roll simple et efficace aux mélodies pop accrocheuses, n’est qu’une facette du phénomène. L’image est tout aussi, sinon plus, importante.
L’épicentre britannique : Bowie, bolan et l’invention d’un genre
Marc Bolan, leader du groupe T. Rex, est souvent considéré comme l’un des pionniers. Avec ses cheveux bouclés, son visage fardé de paillettes et ses tenues en satin, il transforme ses apparitions télévisées en moments de pure magie. Des titres comme « Get It On » ou « Children of the Revolution » deviennent des hymnes pour une génération. Bolan joue avec les codes, mélangeant une sensibilité poétique à une attitude rock’n’roll brute. Il ouvre la voie à une nouvelle forme d’expression où l’apparence devient une extension de la musique.
Puis vient l’ouragan David Bowie. Avec son alter ego Ziggy Stardust, un extraterrestre androgyne et messianique, Bowie pousse le concept du glam à son paroxysme. Cheveux rouge flamboyant, combinaison moulante et maquillage théâtral, il brouille les frontières entre les genres. Son album The Rise and Fall of Ziggy Stardust and the Spiders from Mars (1972) est la bande-son de ce mouvement. Bowie ne se contente pas de chanter, il incarne des personnages, créant une mythologie fascinante qui captive le public. Sa démarche artistique, mêlant musique, mode et performance, est une véritable révolution.
D’autres groupes britanniques comme Roxy Music, avec le dandy futuriste Bryan Ferry, ou Sweet et Slade, avec leurs tenues outrancières et leurs hymnes glam rock, contribuent à faire de ce style un phénomène de masse. Les concerts deviennent des spectacles grandioses, où les lumières, les costumes et l’attitude scénique créent une expérience immersive et inoubliable.
Le look glam rock : un manifeste vestimentaire et un vrai style
Le style glam rock est une véritable déclaration d’intention. Il rejette le naturel et prône l’excès, l’artifice et la provocation. Les matières brillantes sont reines : le satin, le velours, le vinyle et le cuir se déclinent dans des couleurs éclatantes. Les paillettes, les plumes, et les strass ornent les costumes de scène, captant la lumière et l’attention.
Les coupes sont audacieuses. Les pantalons pattes d’éléphant, souvent taille haute, les combinaisons moulantes qui soulignent le corps et les vestes cintrées définissent la silhouette glam. Un élément phare du vestiaire est sans conteste les chaussures à plateforme, ou platform boots, qui ajoutent une touche de grandeur et de théâtralité à la démarche.
Le maquillage est un autre pilier essentiel. Loin d’être discret, il est exubérant et s’adresse autant aux hommes qu’aux femmes. Le fard à paupières coloré, l‘eye-liner prononcé et, bien sûr, les paillettes sur le visage deviennent des signatures. Cette esthétique androgyne est au cœur du mouvement ; elle questionne les stéréotypes de genre et offre une nouvelle liberté d’expression.
L’écho américain : plus brut, plus sauvage
De l’autre côté de l’Atlantique, le glam rock prend une tournure différente, plus urbaine et plus crue. À New York, les New York Dolls incarnent cette version américaine. Leur look, un mélange de travestissement outrancier et de dégaine rock’n’roll, est aussi important que leur musique. Leur son, un rock garage énergique, préfigure le mouvement punk.
Lou Reed, après son départ du Velvet Underground, embrasse l’esthétique glam avec son album Transformer (1972), produit par David Bowie. Des titres comme « Walk on the Wild Side » explorent les marges de la société new-yorkaise avec une poésie sulfureuse. Son look androgyne et son maquillage marqué l’inscrivent pleinement dans le mouvement.
N’oublions pas Iggy Pop qui, avec The Stooges, pousse la performance scénique à des extrêmes de sauvagerie. Bien que musicalement plus proche du proto-punk, son esthétique – torse nu, pantalon moulant et attitude provocante – partage avec le glam ce goût pour le spectacle et le dépassement des conventions. Alice Cooper, avec son rock théâtral et horrifique, est une autre figure majeure de cette scène américaine, où le spectacle prime.
Et en France ? Une adoption plus discrète du style Glam rock
En France, le glam rock n’a pas eu l’ampleur d’un phénomène de masse comme au Royaume-Uni. Cependant, certains artistes ont su capter l’air du temps et intégrer des éléments de cette esthétique flamboyante.
Michel Polnareff, avec sa chevelure blonde platine, ses lunettes blanches emblématiques et ses tenues excentriques, est sans doute celui qui s’en est le plus approché. Son sens de la provocation et son allure androgyne faisaient écho à l’esprit glam. L’affiche de son concert à l’Olympia en 1972, où il pose fesses nues, est un coup de génie marketing qui a marqué les esprits.
Claude François et ses Claudettes, bien que relevant de la variété, ont aussi emprunté au glam son amour des paillettes, des costumes scintillants et des chorégraphies millimétrées. Le spectacle était total, visuel et énergique. D’autres artistes comme Alain Kan ont tenté une incursion plus directe dans le glam rock, mais avec un succès plus confidentiel.
L’héritage durable du glam rock
Le glam rock, dans sa forme originelle, s’essouffle vers le milieu des années 1970, balayé par la déferlante punk qui prône un retour à une esthétique plus brute et « authentique ». Pourtant, son influence est loin de s’être éteinte.
Musicalement, il a ouvert la voie à de nombreux genres. Le punk lui a emprunté son énergie et ses mélodies simples. Le disco a repris son goût pour les tenues extravagantes et les paillettes. Plus tard, le glam metal des années 80 (Mötley Crüe, Poison) s’inspirera directement de son esthétique. Des artistes comme Prince ou Madonna, maîtres de la métamorphose, doivent beaucoup à l’audace d’un David Bowie.
Dans la mode, l’héritage est omniprésent. L’androgynie, les coupes audacieuses, l’utilisation de matières métalliques et de paillettes reviennent régulièrement sur les podiums des plus grands créateurs. Le glam a durablement marqué l’imaginaire collectif en prouvant que la mode est un terrain de jeu, un moyen d’expression et de réinvention de soi.
En définitive, le glam rock fut bien plus qu’une mode et un style. Ce fut un moment de libération créative, une explosion de couleurs et d’audace. Il a repoussé les limites de la musique et du style. Il a montré que l’on pouvait être à la fois artiste et œuvre d’art, et que la scène était un espace où tous les fantasmes étaient permis.
FAQ sur le style glam rock
Qu’est-ce qui définit principalement le style musical glam rock ?
Le glam rock se caractérise musicalement par un retour à des structures rock’n’roll simples et directes, combinées à des mélodies pop très accrocheuses. Les arrangements sont souvent plus élaborés que dans le rock classique, intégrant parfois des cordes ou des cuivres. La production est soignée pour créer un son puissant et « glamour ».
Pourquoi l’androgynie était-elle si importante dans le glam rock ?
L’androgynie était une forme de provocation et de rébellion contre les normes sociales et les stéréotypes de genre très rigides de l’époque. En portant du maquillage, des talons hauts et des tenues considérées comme féminines, les artistes masculins du glam rock questionnaient la définition de la masculinité. Ils offraient à leur public une nouvelle forme de liberté et d’expression identitaire.
Encore à savoir sur le style glam rock
Le glam rock a-t-il eu du succès aux États-Unis ?
Le succès du glam rock a été beaucoup plus mitigé aux États-Unis qu’au Royaume-Uni. Si des artistes comme David Bowie ou Lou Reed y ont trouvé un public, le mouvement dans sa globalité n’a pas atteint le statut de phénomène de masse. La scène américaine a développé sa propre version du glam. Celle-ci est souvent plus dure et plus proche du hard rock ou du proto-punk, avec des groupes comme les New York Dolls ou Alice Cooper.
Comment s’habiller pour adopter un look glam rock aujourd’hui ?
Pour un look glam rock moderne, misez sur des pièces fortes : un pantalon en similicuir ou un jean enduit, un perfecto et des bottines à plateforme. N’hésitez pas à jouer avec les matières brillantes comme le satin ou le velours. Ajoutez une touche de couleur vive ou un imprimé animal. Pour les accessoires, pensez aux bijoux en argent, aux ceintures à grosse boucle. Pour les plus audacieux, ajoutez une touche de paillettes ou un maquillage des yeux plus marqué.
