Qui n’a jamais souri en croisant le regard espiègle d’une petite figurine au corps potelé, aux oreilles pointues et, surtout, à l’imposante chevelure colorée défiant les lois de la gravité ? Les personnages trolls sont bien plus que de simples jouets. Ce sont des capsules temporelles, des porte-bonheurs d’une autre époque qui ont traversé les décennies sans jamais perdre de leur charme. Plongeons ensemble dans l’histoire fascinante de ces petites créatures. De leur naissance dans une forêt danoise, elles ont acquis le statut d’objets de collection cultes.
L’origine modeste d’un phénomène mondial
L’histoire des personnages trolls commence non pas dans une grande usine de jouets. Elle débute dans le petit village de Gjøl, au Danemark, à la fin des années 1950. Thomas Dam, un homme modeste travaillant comme bûcheron et pêcheur, se retrouva sans emploi. Pour faire plaisir à sa jeune fille Lila, il décida de lui sculpter une petite poupée inspirée des créatures du folklore scandinave. Utilisant du bois, il façonna une figurine à l’apparence singulière : un visage expressif, presque grotesque, mais indéniablement amical. Cette première création, bien loin des standards de beauté des poupées de l’époque, possédait une âme.
Le jouet plut tellement aux amies de sa fille que Thomas Dam se mit à en produire davantage. Il fonda son entreprise, Dam Things, et commença à vendre ses créations localement. Le succès fut immédiat, dépassant toutes ses attentes. Rapidement, il abandonna le bois au profit d’un mélange de pâte de bois et de colle, puis d’un vinyle souple. Ce matériau était plus adapté à une production de masse. Les fameux cheveux en fourrure de mouton ou en mohair, ainsi que les yeux en verre, devinrent la signature des premiers Trolls Dam. Chaque figurine était un petit porte-bonheur. L’idée provenait directement de la mythologie nordique où les trolls, bien que parfois effrayants, étaient aussi des gardiens de la nature dotés de pouvoirs magiques.
La première vague : La folie des trolls dans les années 60
Le véritable raz-de-marée déferla au début des années 1960. Les Trolls Dam, désormais fabriqués en caoutchouc puis en vinyle, traversèrent l’Atlantique pour conquérir l’Amérique. Entre 1963 et 1965, les États-Unis furent saisis par une véritable « Troll Craze« . Ces figurines devinrent le jouet incontournable, un phénomène de mode que tous les enfants, et même les adultes, s’arrachaient. On les voyait partout : sur les tableaux de bord des voitures, au bureau, et bien sûr, dans les chambres d’enfants.
Le succès fut tel que le copyright initial de Thomas Dam, mal protégé à l’international, ne put empêcher l’apparition de nombreuses imitations. Des entreprises comme Uneeda Doll Company lancèrent leur propre version, les « Wish-niks ». Elles étaient reconnaissables à leur plastique plus dur et à leur prix plus abordable. D’autres concurrents inondèrent le marché avec des copies de qualité variable. Cette prolifération, si elle démocratisa le troll, dilua aussi l’image de marque et contribua à la saturation du marché. À la fin des années 60, la folie retomba aussi vite qu’elle était apparue. Les trolls furent relégués au fond des coffres à jouets, attendant patiemment leur heure.
Reconnaître un personnage troll vintage authentique
Pour le collectionneur d’aujourd’hui, distinguer un troll original des années 60 d’une copie est un véritable jeu de piste. Les plus recherchés sont, sans conteste, les créations originales de Thomas Dam.
Voici quelques indices pour les identifier :
- Les marquages : Les trolls Dam authentiques portent généralement un marquage sous un pied ou dans le dos. Cherchez les inscriptions « Dam Things« , « Made in Denmark« , ou simplement « Dam« . Les modèles les plus anciens peuvent même porter le nom « Thomas Dam ».
- Les matériaux : Les premiers trolls étaient faits d’un vinyle souple et lourd, agréable au toucher. Leurs cheveux étaient souvent en mohair ou en laine de mouton véritable, plus doux et plus fins que les cheveux synthétiques des modèles ultérieurs.
- Les yeux : Le détail qui tue ! Les trolls Dam produits jusqu’au milieu des années 60 possédaient de magnifiques yeux en verre (souvent de couleur ambre, mais aussi bleus, verts ou rouges), leur conférant une profondeur et une expression uniques. Les copies et les modèles plus tardifs ont des yeux en plastique peint.
- Les modèles rares : Thomas Dam ne s’est pas contenté de créer des trolls humanoïdes. Il a également produit des animaux : des lions, des girafes, des singes, des chevaux… Ces figurines animales sont aujourd’hui extrêmement rares et très prisées des collectionneurs. Il existe aussi des modèles spéciaux comme les trolls à deux têtes qui atteignent des prix élevés sur le marché.
Le grand retour : Les trolls dans les années 80 et 90
Après une longue hibernation, les trolls firent un retour fracassant à la fin des années 80 et au début des années 90. Cette seconde vague fut principalement portée par la société Russ Berrie. Cette entreprise racheta les droits de distribution et modernisa l’image du troll pour une nouvelle génération. Les cheveux devinrent plus flashy que jamais, adoptant toutes les couleurs de l’arc-en-ciel.
Cette nouvelle ère fut marquée par une diversification incroyable des modèles. Les plus emblématiques sont sans doute les « Treasure Trolls ». Ils arboraient une pierre en plastique (censée être un diamant, un rubis, etc.) à la place du nombril. Le marketing était simple et génial. Il suffisait de frotter la pierre pour qu’elle exauce vos vœux ! On vit aussi apparaître des trolls thématiques : des sportifs, des musiciens, des trolls de Noël, des super-héros… Ils se déclinèrent en une multitude de produits dérivés. Notamment les fameux « pencil toppers« . Ces mini-trolls conçus pour être plantés au bout d’un crayon devinrent un incontournable des cours de récréation.
Plus qu’un simple jouet : Le troll comme objet de collection
Aujourd’hui, le troll vintage est un objet de collection à part entière. Sa popularité ne repose pas uniquement sur la nostalgie. Il incarne une esthétique « ugly-cute » (mignon-laid) qui continue de séduire. Ces figurines sont la preuve qu’un objet n’a pas besoin d’être conventionnellement beau pour être aimé. Leur charme réside dans leur imperfection, leur expression malicieuse et la promesse de bonne fortune qu’ils transportent.
La valeur d’un troll vintage dépend de plusieurs facteurs :
- Le fabricant : Un troll Dam original aura toujours plus de valeur qu’une copie Uneeda ou une production de masse des années 90.
- La rareté : Les modèles animaux, les personnages spéciaux ou les trolls avec des couleurs de cheveux inhabituelles sont très recherchés.
- L’état de conservation : Un troll en parfait état, avec ses cheveux d’origine bien fournis, sans taches sur le vinyle et, idéalement, avec ses vêtements ou accessoires d’origine, verra sa cote grimper.
- Les yeux : La présence d’yeux en verre est un critère déterminant pour évaluer les modèles les plus anciens.
Du simple porte-bonheur sculpté dans un bout de bois à l’icône de la pop culture déclinée en films d’animation, le troll a parcouru un chemin extraordinaire. Il nous rappelle qu’avec un peu d’imagination et beaucoup de cheveux, même la plus étrange des créatures peut conquérir le monde.
FAQ sur les trolls et leurs personnages
Comment différencier un troll Dam original d’une copie ?
Le moyen le plus sûr est de chercher les marquages sous les pieds ou au dos (« Dam« , « Dam Things« , « Made in Denmark »). Observez également les yeux : les modèles Dam des années 60 ont des yeux en verre, tandis que la plupart des copies ont des yeux en plastique. La qualité du vinyle, plus lourd et souple, et des cheveux (mohair) sont aussi d’excellents indicateurs.
De quoi étaient faits les tout premiers trolls ?
Les tout premiers trolls sculptés par Thomas Dam pour sa fille étaient en bois. Pour la production commerciale initiale, il a utilisé une sorte de pâte à base de copeaux de bois et de colle, avant de passer rapidement au caoutchouc puis au vinyle souple qui est devenu la norme.
Pourquoi les trolls sont-ils redevenus si populaires dans les années 90 ?
Leur retour dans les années 90 est un mélange de nostalgie des parents qui avaient connu la première vague. La stratégie marketing brillante joua également un rôle clé. L’introduction de nouvelles gammes comme les « Treasure Trolls » avec leurs gemmes et la diversification des thèmes ont su capter l’imagination d’une nouvelle génération d’enfants.
Encore à savoir sur les Trolls et leurs personnages
Mes vieux trolls des années 90 ont-ils de la valeur ?
En général, les trolls des années 90 produits en très grande quantité (comme ceux de la marque Russ) ont une valeur sentimentale plus que financière. Cependant, certains modèles thématiques rares, en édition limitée ou en parfait état avec leur emballage d’origine, peuvent intéresser les collectionneurs et avoir une certaine valeur.
Qu’est-ce qu’un « Wish-nik » ?
Les « Wish-niks » étaient la ligne de trolls produite par la société américaine Uneeda Doll Company dans les années 60 pour concurrencer les trolls Dam. Ils étaient généralement fabriqués dans un plastique plus dur et plus léger, avec des cheveux synthétiques et des yeux en plastique. Cela les rendait moins chers à l’achat.
