Il est des gammes de jouets qui ne font que passer. D’autres, au contraire, définissent une époque. Les Maîtres de l’Univers appartiennent sans l’ombre d’un doute à la seconde catégorie. Arrivées en France au début des années 80, des figurines Maitres de l’univers à la musculature saillante et aux accessoires baroques ont pris d’assaut les chambres d’enfants et les cours de récréation. Incarnées par le duel iconique entre Musclor (He-Man) et Skeletor, elles ont donné naissance à un univers riche, mêlant heroic fantasy et science-fiction. Plus que de simples morceaux de plastique, ces jouets étaient des invitations à l’aventure, des catalyseurs d’imagination. Retour sur un phénomène qui, quarante ans plus tard, n’a rien perdu de sa puissance.
Un univers né d’une opportunité manquée
L’histoire des figurines Maitres de l’Univers commence à la fin des années 70. Le géant du jouet Mattel observe, sans doute avec une pointe de regret, le triomphe colossal des figurines Star Wars de son concurrent Kenner. Mattel avait refusé la licence du film de George Lucas, jugeant le prix demandé trop élevé. Face à cet immense succès, la direction de Mattel demande à ses équipes de créer une nouvelle ligne de figurines d’action pour garçons qui pourrait rivaliser. Le projet est confié à un designer visionnaire, Roger Sweet. En 1980https://nosanneesvintage.fr/decouvrez-les-jeux-annee-80-jouets-et-jeux-cultes/, s’inspirant de l’imagerie populaire des barbares et de la fantasy, popularisée notamment par les illustrations de Frank Frazetta pour Conan le Barbare, Sweet présente trois prototypes de son concept « He-Man ». L’idée maîtresse est simple mais géniale : un barbare surpuissant dans un univers de science-fiction.
Ce mélange audacieux, souvent résumé par la formule « Conan rencontre Star Wars« , est le coup de génie de la gamme. Il permet de justifier la présence d’épées, de haches et de magie aux côtés de pistolets laser, de véhicules volants et de châteaux high-tech. Mattel donne son feu vert. Les designers et sculpteurs, notamment Mark Taylor, se mettent au travail pour donner vie à un univers complet. La planète Eternia et ses habitants prennent forme.
La naissance de Musclor et Skeletor : une conception unique
La première vague de figurines Maitre de l’univers déferle sur le marché américain en 1982, puis en France peu de temps après. Le succès est immédiat, en grande partie grâce à la conception même des jouets. Contrairement aux figurines Star Wars, plus petites et sveltes, les Maîtres de l’Univers sont massifs. Hauts d’environ 14 cm (5,5 pouces), ils sont surtout incroyablement musclés. Mattel a l’idée d’utiliser un nombre limité de moules de corps de base, ce qui permet de réduire les coûts tout en créant une identité visuelle forte. Musclor, Skeletor et la plupart des premiers personnages partagent ce même torse aux abdominaux dessinés et ces mêmes cuisses bodybuildées.
Chaque figurine possède une fonction de jeu simple mais terriblement efficace. Le mécanisme le plus célèbre est le « Power Punch » : en tournant le torse de la figurine, un élastique interne se tend, et en le relâchant, le personnage assène un puissant coup de poing ou d’épée. D’autres personnages ont des gimmicks uniques : Le Monstre (Beast Man) a les bras articulés aux coudes, Stratos peut « voler » grâce à ses ailes amovibles. Chaque personnage est vendu avec une armure ou un harnais et une ou plusieurs armes, ce qui augmente la jouabilité.
Plus que des jouets : le Château des Ombres et les mini-comics
Mattel comprend vite qu’il ne faut pas seulement vendre des personnages, mais un monde entier. La pièce maîtresse de cet univers devient le playset du Château des Ombres (Castle Grayskull). Cette forteresse en plastique vert, ornée d’une immense face de crâne, est le rêve de tous les enfants. Elle s’ouvre en deux pour révéler un intérieur rempli de pièges et de fonctionnalités : un pont-levis en forme de mâchoire, un ascenseur, une trappe menant à un cachot et un trône mystérieux. Le château devient le théâtre de toutes les batailles imaginaires entre les forces du bien et du mal.
Pour donner de la profondeur à l’histoire, Mattel a une autre idée brillante. Chaque figurine est vendue avec une petite bande dessinée, un « mini-comic ». Ces livrets racontent les origines des personnages et les enjeux de leur combat. Fait fascinant pour les collectionneurs, les toutes premières BD présentent une version très différente de l’histoire que nous connaissons. Musclor n’est pas un prince, mais un barbare issu d’une tribu de la jungle. Il n’y a pas de Prince Adam ni de transformation. Le Château des Ombres est une source de pouvoir que Musclor doit protéger de Skeletor, un démon venu d’une autre dimension. Ces mini-comics sont la toute première bible de l’univers, avant qu’il ne soit redéfini par la télévision.
Le dessin animé Filmation, le raz-de-marée planétaire
En 1983, pour soutenir les ventes et développer l’histoire, Mattel commande une série animée au studio Filmation. C’est ce dessin animé qui va faire des Maîtres de l’Univers un phénomène mondial. Cependant, les scénaristes de Filmation doivent adapter l’univers pour le rendre plus acceptable pour un jeune public et les chaînes de télévision. Ils adoucissent la violence et créent un alter ego pour Musclor : le Prince Adam, fils du Roi Randor et de la Reine Marlena. C’est en brandissant son Glaive Magique et en criant la phrase culte « Par le pouvoir du crâne ancestral, je détiens la force toute-puissante ! » qu’il se transforme en Musclor.
Cette dualité Prince Adam/Musclor devient le cœur de la série. Le dessin animé introduit de nombreux personnages et développe leurs relations. En France, la série est diffusée dans Récré A2 et connaît un succès phénoménal. La voix française de Musclor (assurée par Jacques Ferrière puis Patrick Messe) et celle de Skeletor (Philippe Dumat) sont gravées dans les mémoires. Le dessin animé devient une formidable publicité de 20 minutes, chaque nouvel épisode présentant de nouveaux personnages ou véhicules que les enfants s’empressent de réclamer.
Collectionner les figurines Maitres de l’Univers aujourd’hui
Quarante ans plus tard, la passion est toujours vive. Collectionner les figurines MOTU vintage est un hobby passionnant. Pour le collectionneur débutant, voici quelques clés. La première chose à savoir est la « maladie des jambes ». Les deux jambes des figurines sont reliées au bassin par un simple élastique en caoutchouc noir. Avec le temps, ce caoutchouc sèche, devient cassant et finit par se rompre. Il est donc très courant de trouver des figurines « cul-de-jatte ». Heureusement, il est assez facile de trouver des élastiques de remplacement et des tutoriels pour les réparer.
Ensuite, il faut vérifier que la figurine est complète (« loose complete » en jargon de collectionneur). Chaque personnage avait son armure et ses armes spécifiques. Une figurine nue perd beaucoup de sa valeur. Skeletor doit avoir son harnais, son épée violette et son sceptre à tête de bélier. Musclor doit avoir son harnais, sa hache, son bouclier et son Glaive Magique. La valeur d’une figurine dépend de sa rareté et de son état. Les personnages de la première vague sont courants et abordables en loose. En revanche, les personnages des dernières vagues, comme les Hommes-Serpents ou certains membres de la Horde, sont beaucoup plus rares et chers. Une figurine encore sous blister (sur sa carte d’origine, non ouverte) peut atteindre des sommes très importantes.
En conclusion, Les Maîtres de l’Univers furent bien plus qu’une simple réponse à Star Wars. Ils ont créé leur propre voie, avec une esthétique unique et une mythologie qui a su évoluer. De la vision barbare des premiers mini-comics à l’épopée plus chevaleresque du dessin animé, la gamme a su captiver l’imagination de millions d’enfants. Aujourd’hui, ces figurines musclées sont les gardiennes de nos souvenirs, la preuve en plastique que, le temps d’une après-midi, nous détenions nous aussi la force toute-puissante.
Foire Aux Questions (FAQ) autour des figurines Maitres de l’Univers
Q : Quand les figurines des Maitres de l’Univers sont-elles sorties pour la première fois ?
R : Elles ont été lancées en 1982 aux États-Unis par Mattel. Elles sont arrivées en France peu de temps après, généralement à partir de 1983, et leur popularité a explosé avec la diffusion du dessin animé.
Q : Quel est le principal problème des figurines vintage aujourd’hui ?
R : Le problème le plus courant est la dégradation de l’élastique en caoutchouc qui relie les jambes au torse. Cet élastique sèche et se casse avec le temps, laissant la figurine en deux parties. C’est cependant réparable.
Q : Musclor et le Prince Adam sont-ils la même personne dans les jouets originaux ?
R : Non. Dans les toutes premières bandes dessinées vendues avec les figurines, Musclor était un barbare d’une tribu sauvage. Le personnage du Prince Adam et le concept de transformation ont été créés plus tard, en 1983, pour la série animée du studio Filmation.
Q : Quel est le jouet le plus emblématique de la gamme, hors figurines ?
R : Sans hésitation, le Château des Ombres (Castle Grayskull). Ce playset en forme de crâne était le quartier général de Musclor et le centre de l’univers. C’est aujourd’hui une pièce maîtresse dans toute collection qui se respecte.
Q : Toutes les figurines ont-elles la même valeur ?
R : Non, absolument pas. Les personnages très populaires et produits en masse comme Musclor ou Skeletor sont très abordables en occasion (sans emballage). En revanche, les personnages issus des dernières vagues de production (1986-1987), comme Tytus, Megator ou l’Eternia Playset, sont extrêmement rares et peuvent valoir plusieurs milliers d’euros.
